Par Emmanuelle Maignial – Secrétaire Itinérante Régionale méditerranée
« Sois fidèle jusqu’à la mort… » Des disciples fidèles à leur Seigneur tout au long de leur vie terrestre, afin de jouir de l’Éternité en sa présence… Est-ce possible ? Au crépuscule de sa vie terrestre, l’apôtre Paul évalue sa propre vie et sa fidélité à Dieu. Au travers de ses exhortations à Timothée nous percevons mieux ce que Dieu attend de nous et comment demeurer fidèles.
« J’ai combattu le bon combat, j’ai achevé la course, j’ai gardé la foi » : deux métaphores – celle du soldat et celle de l’athlète qui mènent à bien leur mission – et une conclusion : « au terme de ma vie, je peux affirmer que je suis resté fidèle». Grâce à la métaphore militaire, on saisit que l’intégralité de la vie et de l’énergie de Paul a été consacrée à Dieu et à la foi en Jésus-Christ. Il n’a pas identifié plusieurs combats à mener dans la vie ; un seul est digne d’être mené, un seul a du sens, un seul est porteur d’espérance : le combat pour l’Évangile, c’est-à-dire annoncer le Christ crucifié et garder Ses commandements. Un engagement radical au détriment de tout le reste, voilà comment Paul marque sa fidélité envers Dieu. L’apôtre manifeste celle-ci à l’extrême puisqu’il se considère « déjà répandu en libation », offert comme un sacrifice final. Non seulement il n’a pas abandonné le message de l’Évangile devant la menace, mais l’a proclamé et l’a défendu jusque devant les tribunaux (v.17) !
Motivé
Quelle est la motivation de Paul ? Qu’est-ce qui lui permet de qualifier ce combat de « bon » ? On trouve comme fondement de sa fidélité ce qu’il connaît du caractère de Dieu : sa grâce, son amour et sa fidélité envers lui. Paul mentionne souvent dans ses lettres la base de sa foi et de son ministère : un Dieu qui a appelé au salut un persécuteur de l’Église et qui l’a jugé digne de confiance pour le service.
Cet amour que Paul porte à Dieu et à l’Évangile tranche avec celui de Démas (v.10) qui lui, reporte son amour sur le monde actuel : il n’a pas forcément abandonné Dieu, mais recule devant le sacrifice exigé et renonce à accompagner Paul dans l’opposition. Un abandon qui contraste non seulement avec la détermination de Paul mais également avec l’amour des fidèles qui « aiment la manifestation de Jésus »,qui attendent son retour avec joie et confiance (v.8) car ce Jour révélera pleinement l’objet de leur espérance.
Fidèle et joyeux
Une vie de fidélité à Dieu est certes la seule digne d’être vécue, mais elle relève bien plus d’une lutte que d’une promenade dominicale ; le parcours de Paul a été émaillé de difficultés en tous genres : oppositions et persécutions, conflits, imprévus, naufrage, procès ; cependant ce n’est pas aux circonstances que Paul regarde pour rester fidèle sur la durée. À la base de sa persévérance, on trouve la conviction que la vie avec le Seigneur – aussi risquée soit-elle – est un gain, car elle débouche sur la vie éternelle en présence de Christ. Aux Philippiens il partage son ardent désir de rejoindre Christ, tout en admettant que sa tâche sur terre n’est pas finie (1.23)– persévérance dans le combat encore, car sa fidélité à Dieu se manifeste également envers ses frères et sœurs dans la foi. En effet, si c’est d’abord à la lumière de la vie à venir que Paul évalue la vie présente et trouve l’envie et la force de persévérer, c’est aussi à la lumière de son ministère terrestre, afin que d’autres progressent et atteignent comme lui « la joie dans la foi » (Ph 1.26). Car en dépit des obstacles, Paul non seulement persévère… mais il le fait dans la joie. Joie qu’il exprime à de nombreuses reprises dans ses lettres de voir Dieu à l’œuvre dans la vie des chrétiens. Christ ne nous appelle pas à une fidélité morose, mais joyeuse, nous invitant à nous reposer sur lui pour que son fardeau soit léger et son joug facile (Mt 11.28-30). Paul y parvient, en gardant l’éternité comme perspective, en considérant l’œuvre de Dieu dans la vie des autres disciples et en jugeant cette vie préférable à sa vie d’avant.
Récompensé !
Joie dans la persévérance sur terre, et couronne dans le ciel. Outre son espérance de passer l’éternité avec Christ, Paul a une autre certitude qu’il partage à Timothée : une couronne de justice (la justification) lui est réservée, qui récompense sa fidélité. Paul est-il présomptueux en prétendant à la couronne de justice ? Pas si l’on considère la persévérance comme une vertu générée par le Saint-Esprit. La fidélité et la joie qui l’accompagnent sont citées comme fruit de l’Esprit. Les serviteurs qualifiés de « fidèles » en Matthieu 25 l’ont été parce qu’ils ont fait fructifier ce que l’on leur avait remis – le serviteur infidèle ayant pareillement reçu mais n’en ayant rien fait. C’est donc Dieu qui donne d’être fidèle, comme Paul se plaisait à le rappeler aux croyants : les œuvres bonnes (dont la fidélité) sont préparées d’avance pour que nous les pratiquions (Éph 2:10) dans notre union à Jésus-Christ. Nous ne pouvons pas persévérer et être fidèles sur la durée d’une vie à partir de nos efforts humains. Paul se permet de prétendre à la couronne car il reconnaît que ses efforts ont été l’œuvre de l’Esprit dans sa vie ; Dieu produit « le vouloir et le faire », ce qui permet à Paul de mettre en œuvre son salut jusqu’au bout, d’achever la course et de remporter la victoire. Et Paul a beau être à la fin de sa vie, il continue à compter sur le Seigneur, le temps qu’il lui reste à vivre, pour parvenir jusqu’à son Royaume (v.18). Un modèle que nous sommes invités à suivre.