Michée 5.1 & Matthieu 2.6 : Le retour du roi (3)

Sommaire

  1. Matthieu 1&2 – Introduction
  2. Ésaïe 7.14 & Matthieu 1.23 – Le signe de l’Emmanuel
  3. Michée 5.1 & Matthieu 2.6 : Le nouveau David
  4. Osée 11.1 & Matthieu 2.15 : Je suis ton Père
  5. Jérémie 31.15, Matthieu 2.18 & 2.23 : La nouvelle alliance

Le nouveau David

Après la naissance miraculeuse de Jésus, la menace vient très vite. Des Mages, c’est-à-dire des savants, veulent voir le roi des juifs qui vient de naître et s’adressent pour cela à celui qu’ils pensent être bien placé pour répondre à leur question : Hérode, le roi de Judée. Ce dernier n’est pas jouasse, probablement surpris, il consulte les spécialistes de la loi pour savoir où est né ce roi. Ceux-ci se tournent vers la prophétie de Michée 5.1 annonçant que le messie devait naître à Bethlehem. Cette citation est légèrement différente des autres puisqu’elle n’est pas faite par le narrateur mais par des personnages du récit et il n’est pas question d’un accomplissement, cependant la formule de citation « par l’entremise du prophète » est identique. Mais c’est bien un accomplissement implicite puisque Jésus est né à Bethlehem.

Le lecteur attentif sera peut-être surpris de voir que la citation est un peu différente du texte originel. Bethlehem est petite parmi les chefs de Juda dans Michée et elle n’est pas la moins importante dans Matthieu. Pourquoi Matthieu dit-il le contraire de Michée ? Est-ce qu’il tort le sens de la prophétie ? En fait, formellement, Matthieu ne fait pas vraiment une citation. Il fait plutôt une grosse référence qui pointe vers la prophétie de Michée, mais pas seulement vers Michée d’ailleurs, « qui fera paître Israël, mon peuple » reprend le langage de 2 Samuel 5.2 et/ou 1 Chroniques 11.2.

Michée annonçait un contraste, d’une ville négligeable allait sortir un grand roi. Matthieu fait référence à la prophétie de Michée en disant qu’elle s’accomplit avec Jésus mais en même temps il change légèrement la formulation, comme pour l’actualiser. Il préfère une formulation négative. Il aurait pu dire c’est la plus importante plutôt que ce n’est pas la moins importante, c’est un contraste frappant avec la formulation originelle. La négation est en référence à ce que dit Michée, elle souligne une actualisation du statut de cette ville parce que ça y est ! Le messie y est né, elle n’est plus une petite ville, elle est devenue LA ville importante.

Michée annonçait bien un roi, mais pas n’importe lequel. Contemporain d’Ésaïe, il écrit un livre dans lequel Dieu entre en procès avec son peuple et annonce le jugement de l’Exil mais avec une note d’espoir puisqu’après les jugements, Dieu promet qu’il rassemblera son peuple et marchera à sa tête. La prophétie de 5.1 se situe dans un ensemble de trois oracles aux chapitres 4 et 5 qui annoncent un roi assez grandiose. Ces oracles sont délimités en fonction de zones géographiques et de mouvements associés à des promesses. En 4.1-7, de Sion, c’est-à-dire du temple[1] sortira la loi et y est associé la promesse que les nations y afflueront et la paix règnera. Ceux qui auront subis le jugement de Dieu seront rassemblés de nouveau autour du Seigneur et celui-ci sera roi. Avec le thème du temple et de la loi, de la marche à la suite du Seigneur le thème est essentiellement religieux. Puis en 4.8-14, on passe à une dimension plus politique. La souveraineté d’antan viendra sur l’Ophel, la colline où se trouvait probablement le palais du roi. La tour du troupeau est en référence au roi, le berger or celui-ci est absent. Le peuple est sans roi (« N’y a-t-il pas de roi chez toi ? »), dans la souffrance et la douleur. C’est très certainement en référence à l’Exil qui a fait suite au rassemblement de plusieurs nations contre Jérusalem (cf v. 11). Dieu fait la promesse du retour du roi d’antan qui piétinera les nations rassemblées contre Jérusalem. À ce stade on se demande « mais qui donc est ce roi » ? C’est celui qui va alors être annoncé au chapitre 5, celui qui vient de Bethlehem, le berger qui paîtra le peuple, quelqu’un va naître[2]. Et on a une liste de tout ce qu’il va faire. Il va apporter la paix, va rassembler le peuple dispersé puis le Seigneur jugera ceux qui ne l’ont pas écouté.[3]

C’est tout cela qu’accomplit Jésus, il n’est pas roi juste pour le titre mais il est ce nouveau David (« la souveraineté première ») qui va rassembler le reste dispersé, un peuple renouvelé qui marchera à la suite de Dieu. Et ça pète un peu plus qu’à la première lecture de Matthieu.

Comment concrètement se produit ce rassemblement produit par Jésus en une nouvelle nation ? Actes 15.12-21 nous met sur la voie : Jésus par sa mort et sa résurrection, puis par l’envoi du Saint-Esprit sur ceux qui croient rassemble en un nouveau peuple, composé bien sûr des juifs mais aussi des non-juifs. D’ailleurs, ceux qui offrent des cadeaux royaux à Jésus, ce sont des païens ! Bien sûr l’histoire n’est pas finie mais c’est avec Jésus que commence l’histoire de ce peuple nouveau, revêtu de l’Esprit qui adore Jésus comme son roi.

 

Article suivant : Osée 11.1 & Matthieu 2.15 : Je suis ton Père

 

[1] Sion est une colline à Jérusalem sur laquelle est construit le temple.

[2] Le v. 3 « celle qui doit accoucher accouchera » est très probablement une référence à Ésaïe 7.14.

[3] Pour plus de détails sur ces trois chapitres, voir l’article de Matthieu Richelle : https://www.academia.edu/595870/_Un_triptyque_au_coeur_du_livre_de_Mich%C3%A9e_Mi_4-5_Vetus_Testamentum_62_2012_232-47

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