Y a-t-il un Pilate dans l’avion ? Épisode II

Il n’y a plus grand monde qui croit en la politique. Peut-être parce qu’on s’attendait à ce qu’elle change quelque chose et que rien de décisif n’est venu. Mais c’est aussi parce qu’il y a souvent une forme d’arrogance, des postures très théâtrales utilisées pour faire croire que tout est sous contrôle et que les mesures vont fonctionner. Tout cela les gens en ont marre parce que ça sonne faux et puis ça ne donne finalement pas grand chose. Dans sa confrontation avec Jésus en Jean 18.29-19.22, Pilate croit être au centre du jeu et il le revendique parce qu’il n’y a que lui qui a le pouvoir de donner l’ordre de tuer Jésus… mais est-il vraiment le véritable décideur ?

Plan de la série :

  1. La structure
  2. Pilate ne pilote pas (vous y êtes)
  3. Qui a réellement le pouvoir ?

Pour rappel, les blocs et les différentes scènes de l’entretien :

Les 3 contraintes de Pilate

Comme tout responsable politique, le procurateur de Judée n’est pas tout à fait maître de ses mouvements. Il doit gérer un certain nombre de contraintes :

  1. Les juifs qui veulent tuer Jésus,
  2. Jésus qui n’est pas du tout coopératif et… 
  3. la justice qu’il est sensé rendre parce qu’il est gouverneur romain… alors qu’il comprend très vite que Jésus est innocent

Les réactions de Pilate

Lors du premier acte, Pilate prend les choses de manière détachée et méprisante :

  • 1ère scène : les juifs amènent Jésus, en bon juge il s’intéresse à l’accusation mais il ne veut pas s’en occuper puisque les juifs gardaient une certaine autonomie concernant leurs lois religieuses. Le problème c’est que Jésus est pour eux un cas de peine de mort.
  • 2nde scène : Peine de mort, cela veut dire rébellion contre l’Empire Romain. D’où l’interrogatoire pendant lequel Pilate est obsédé par une seule question : « es-tu roi ? » Si Jésus dit « oui » il se rebelle contre Rome et il doit mourir, s’il dit « non » il est libre. Pilate se fiche du reste ! Il se fiche des histoires de juifs, il se fiche des subtilités de Jésus qui dit qu’il est roi d’un autre monde et qu’il rend témoignage à la vérité ! Pilate est pragmatique, la seule vérité est celle qui préserve la paix romaine, paix qui permet de prélever l’impôt.
  • 3ème scène : Il n’empêche qu’il estime que Jésus est inoffensif pour Rome alors il tente de le faire libérer mais ça ne fonctionne pas.
  • 4ème scène : il fait torturer Jésus et laisse les soldat jouer avec lui. Il est assez probable qu’il ait voulu montrer aux juifs ce que les romains font à un roi de pacotille.

En version blocs, voici ce que ça donne :

Dans tout ceci, Pilate n’a pas l’air très concerné.

Dans le 2nd acte par contre, il va trouver ça moins drôle :

  • 1ère scène : Il y a bcp de similitudes avec la 1ère scène de l’Acte I, sauf que les juifs précisent que Jésus se fait Fils de Dieu. Là on quitte le terrain politique (« voici l’homme !») pour aller sur un terrain religieux et pour un romain comme Pilate ça change tout : et si Jésus était un messager des dieux ? ET s’il était un dieu incarné ?
  • 2nde scène : Pilate commence à avoir peur alors il veut connaître l’identité de Jésus. Juste avant Jésus lui a dit qu’il était roi d’une autre monde et maintenant il réitère en disant que Pilate n’a qu’un pouvoir délégué d’en haut ! Même si Jésus est évasif, il semble être un roi divin.
  • 3ème scène : Pilate cherche alors à le relâcher pour ne pas commettre une erreur religieuse. Mais les juifs utilisent des arguments politiques pour ne pas lui laisser le choix : il faut honorer César !
  • 4ème scène : les juifs ont gagné : Pilate fait crucifier Jésus.

En version blocs, voici ce que ça donne :

Pour quelqu’un qui a un grand pouvoir, Pilate n’a pas l’air très libre ! On dirait même que sa marge de manœuvre est ridicule.

Pilate ne pilote pas

Même s’il revendique qu’il a le pouvoir, Pilate a échoué à résister à ses 3 contraintes de départ : résister aux demandes incohérentes des juifs, faire parler Jésus et rendre la justice en l’épargnant. La seule marge de manœuvre qu’il a eu fut d’essayer de démontrer aux juifs que Jésus n’était pas un roi et de leur faire une petite mesquinerie avant la crucifixion en maintenant l’appellation de “roi des juifs” sur l’écriteau (titulus) sur la croix. C’est plutôt maigre, non ? 

Pilate, archétype du dirigeant

L’ironie mordante qui se dégage de ce récit de Jean nous dit quelque chose du pouvoir réel des dirigeants politiques… comme de tout dirigeant en réalité (association, église, famille). Ils doivent composer avec des situations, des personnes qu’ils ne maîtrisent pas pour aller, à peu près et tant bien que mal, dans une direction satisfaisante. Devant cet état de fait, les dirigeants peuvent utiliser diverses stratégies : l’autoritarisme, la manipulation de l’opinion, la bureaucratie, etc. Il existe de nombreux moyens d’avoir un maximum de contrôle, ou en tout cas de faire croire qu’on en a ! Malheureusement les tentations du pouvoir sont grandes et beaucoup sont tombés et tombent encore dans le piège de croire qu’ils ont LA solution, qu’en étant plus rigoureux/sévères ou alors plus fraternels/généreux les choses iront mieux et que leur talent va tout changer. C’est là où l’origine du Péché refait surface : “je suis le sauveur, je n’ai besoin de personne ! J’ai le pouvoir de faire !” Pourtant, il suffit de circonstances un peu exceptionnelles comme une révolte populaire persistante, un méchant virus qui bloque tout un pays ou une crise géopolitique qui fait monter les prix pour que l’illusion du contrôle s’évanouisse.

Prions pour nos autorités !

Nos dirigeants sont comme Pilate quand ils font face à une crise : ils font ce qu’ils peuvent avec la meilleure volonté du monde et un grand dévouement. Mais ils croient trop souvent être au centre du jeu, que leurs mesures vont être décisives… alors que non ! Oui, leur rôle est très important mais leur pouvoir n’est que délégué ar le Seigneur et ils ne contrôlent vraiment pas grand chose en vérité. Nous devons prier pour nos dirigeants comme nous le demandent les apôtres Paul et Pierre. Dieu se sert d’eux malgré tout pour châtier le Mal et encourager le bien. Ils font un boulot terriblement difficile et ingrat ! Alors prions pour eux.

Lors du prochain épisode nous découvrirons qui a vraiment le pouvoir face à Pilate. Vous avez deviné ?

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